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un soutien à l'adoption

Le holding ou thérapie de maintien

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Le maintien, c'est que nous faisons naturellement en tenant un bébé dans nos bras, en le berçant, en le regardant, en lui parlant ou en lui chantonnant un air calme. La majorité des parents font cela d'instinct avec leur bébé, qu'il soit calme et intéressé par les interactions qui se déroulent à ce moment entre son parent et lui, ou qu'il pleure parce qu'il ressent des sensations désagréables. Après quelque temps, l'enfant s'apaise et souvent s'endort.

Cette forme de maintien qui est aussi appelée "contenance" permet au bébé de ressentir la sécurité, la protection et la force tranquille qui émanent de son parent, ce qui le rassure, le calme et lui donne envie d'aller plus loin dans les interactions (regards, gazouillis, caresses…) avec son parent. On appelle cela "l'accordage affectif".

Elle permet aussi au bébé de se sentir en sécurité dans les bras de son parent et de créer progressivement la confiance dans son parent, base de l'attachement.

Cette forme de maintien est à pratiquer très régulièrement avec un bébé adopté. Elle va lui permettre de ressentir progressivement la présence sécurisante et chaleureuse de son ou de ses parents et elle créera les conditions d'un attachement sain. C'est un outil préventif de rematernage et de repaternage qui doit être utilisé avec une intention bienveillante et chaleureuse.

Faites en un rituel quotidien. Prenez le temps chaque jour de vous asseoir dans un fauteuil ou un canapé avec bébé dans les bras de maman et maman dans les bras de papa. Parlez à votre bébé, répétez-lui combien vous l'aimez, combien vous êtes heureux qu'il soit avec vous, que vous êtes fier de lui, de ses progrès, de son sourire, de ses gazouillis… Accompagnez vos paroles de caresses sur ses mains, de mouvements de bercement, de petites chansons. Laissez-lui le temps de vous répondre, par ses regards, ses mouvements, ses gazouillis. Faites-en un moment de bonheur à trois (ou à deux).

Attention, certains bébés même très jeunes n'aiment pas (ou plus) le contact physique.
Il sera parfois difficile de les tenir longtemps dans vos bras sans qu'ils ne manifestent un certain inconfort. Dans ce cas, allez-y plus doucement, plus progressivement. Ne faites pas durer ce moment plus longtemps qu'il ne le supporte, de jour en jour ce temps s'allongera.
Dites au bébé que vous savez que cela lui est difficile car il n'a pas toujours reçu des soins et de l'attention et que cela peut lui faire peur. Dites-lui que dans vos bras il n'est pas en danger et que dans ses yeux vous ne voyez jamais un mauvais bébé mais parfois de la peur. Dites-lui que maintenant il ne sera jamais seul dans vos bras avec sa peur ou sa colère, vous n'avez pas peur de cette colère, de cette peur. Vous la comprenez et c'est votre travail de bon papa ou de bonne maman de vous en occuper. Dites-lui que vous êtes triste qu'il ait souffert avant mais que maintenant il est en sécurité avec vous.

Dans les moments d'inconfort, de malaise, de détresse de votre enfant (après le vaccin, quand il est fiévreux, quand il a été réveillé en sursaut, quand il a peur…) reprenez la même attitude, les mêmes paroles, bercements, chansons… Cela lui permettra de retrouver ses repères et de s'apaiser plus facilement en se sentant en sécurité dans vos bras.

Avec un enfant adopté après un an, essayez de créer le même rituel. Cela prendra sans doute plus de temps, votre enfant sera sans doute plus méfiant, moins enclin à se couler dans vos bras au début. N'arrêtez surtout pas. Ne dépassez pas la durée que l'enfant peut supporter. Eventuellement, ne le tenez pas au creux de vos bras au début, mais avec une petite distance, assis sur vos genoux plutôt que sur vos cuisses par exemple. Essayez de croiser son regard sans insister au début. Pas question de le forcer à rester dans vos bras, ce qui devrait être un bon moment se transformerait vite en séance de torture.

Appelez ce moment d'intimité comme vous le sentez : le moment des câlins, proposez à l'enfant de "recharger ses batteries", de faire "le plein d'affection" … Mais essayez envers et contre tout que ce moment soit très régulier, tous les jours, toujours à la même heure, toujours dans le même fauteuil … Que cela devienne un rituel attendu tant par lui que par vous.

Le sucré participe à la sensation de sécurité, aussi vous pouvez profiter de ce moment pour donner un biberon ou des bonbons. (Attention, ne placez pas ce moment avant le biberon d'un tout petit, qui a besoin de ses repas et qui ne comprendrait pas pourquoi vous les différez ainsi.) Un enfant plus grand peut recevoir ce biberon ou ces bonbons comme une gâterie, comme un autre signe de l'amour de ses parents pour lui. Des bonbons comme les Smarties© sont particulièrement utiles, vous les déposez dans la bouche de votre enfant un à un, vous ne lui proposez pas de se servir dans la boite. Le but est de recréer la sensation du biberon chez le tout petit (sensation qu'il n'a peut-être pas connue avec vous), la sensation apaisante du sucré qui arrive dans la bouche par l'intermédiaire du parent.

Quand l'enfant devient plus grand, ce même moment peut être vécu un peu différemment. Votre enfant est trop grand pour s'asseoir sur vos genoux, alors asseyez-vous à un bout du canapé et proposez-lui de se coucher à côté de vous, sa tête sur vos genoux dans le creux de votre bras. Il pourra ainsi vous regarder et vous parler et vous pourrez le regarder et lui parler. Vous pourrez aussi lui mettre un bonbon en bouche et le caresser de votre main libre.

Ce qui est important, c'est que ce moment revienne aussi régulièrement et rituellement que possible, et qu'il soit vécu dans la tendresse et dans le calme. C'est un moment précieux d'échanges, d'accordage entre le parent et l'enfant.

Chaque fois que votre enfant vit une difficulté, un sentiment de détresse, d'abandon, quel que soit le lieu et l'heure, reprenez autant que possible cette attitude pour le sécuriser.

Lorsque vous le pratiquerez en temps de crise, il est probable que cela lui rappellera des sensations agréables et l'aidera à s'apaiser, et il sera clair pour lui que vous cherchez à le réconforter et non à le sanctionner. Il ne doit pas y avoir de gagnant ou de perdant lorsqu'on fait cela, seulement un moment où l'on souhaite être en communication affective saine et intense avec son enfant, comme le ferait une maman qui berce un bébé qui a des coliques.

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La thérapie du maintien, plus thérapeutique que préventive, consiste à reprendre cette attitude soit quand l'enfant est en colère, soit quand on veut lui faire savoir qu'on n'accepte pas un de ses comportements.

Quand l'enfant est en colère, on peut essayer de le prendre dans ses bras pour l'aider à se calmer. Cette technique n'est utilisable que si le parent est encore physiquement plus fort que l'enfant (et un enfant en colère peut avoir beaucoup de force) et s'il est capable de maintenir son enfant sans s'énerver, sans se fâcher, sans faire mal, malgré les coups que l'enfant lui donne en se débattant. Elle n'a de sens que si le parent peut maintenir l'enfant jusqu'à ce que sa colère soit apaisée et qu'il pleure en cherchant les caresses de son parent. Si le parent doit arrêter plus tôt et laisser l'enfant soit parce que celui-ci est trop fort, soit parce que le parent ressent trop de colère lui aussi, il vaut mieux ne pas l'entreprendre.

Quand on veut faire savoir à un enfant qu'on n'accepte pas son comportement, on peut aussi commencer par le prendre dans ses bras pour lui parler. C'est une façon de lui faire sentir qu'on l'aime même si on n'accepte pas un de ses comportements. Une bonne façon de le prendre pour éviter les coups et le maintenir, c'est de s'asseoir sur une chaise de le prendre à califourchon sur les genoux face à vous. Vous entourez son corps de vos bras et vous le maintenez. De cette façon, les coups de pied qu'il donnera seront généralement inefficaces. Si vous êtes deux, l'autre parent peut se mettre dans le dos de l'enfant et l'entourer aussi de ses bras. Une autre façon de le tenir est de l'envelopper de la tête aux pieds dans une couverture pour empêcher ses mouvements.

Puis on parle à l'enfant de son comportement et du fait qu'on n'est pas d'accord avec ce qu'il a fait (à réserver à des comportements totalement inacceptables comme des violences à autrui). L'enfant va se débattre, essayer de se dérober. Ici aussi il faudra tenir bon, à la fois physiquement et mentalement, ne pas se mettre en colère mais laisser la colère de l'enfant s'épuiser sans l'entretenir par des commentaires inutiles.

La séance peut durer longtemps, il faut y être prêt, et ne devrait se terminer que quand l'enfant est passé de la colère à la tristesse, quand il se met à pleurer et que vous le consolez. C'est dans ce moment de tristesse, de détresse que se crée l'attachement. L'enfant apprend que s'il a un sentiment très puissant (un de ceux qui menacent de le submerger) son parent sera là pour l'aimer et prendre soin de lui, et il apprendra ainsi à faire confiance.

Dans cette technique de maintien peu intrusive telle qu'elle vient d'être décrite, le parent maintient, cajole et nourrit son enfant. Les enfants qui souffrent de troubles de l'attachement n'aiment pas être tenus. Ils craignent la proximité parce que cela veut dire pour eux une perte de contrôle. Ils ont généralement un modèle opérationnel négatif qui dit "Quand maman me tient, cela me fait mal." A cause de cette peur, ils luttent très fort pour garder le contrôle, pour éviter d'avoir mal à nouveau.

Cette méthode appelée le Temps de Maintien et a été développée par Welch et Tinbergen (1984). Il est fortement déconseillé que des parents l'utilisent seuls, sans l'aide d'un thérapeute averti et sans qu'une évaluation complète des forces et fragilités de l'enfant n'ait été réalisée par un professionnel. Il faudra que ce professionnel guide et enseigne bien aux parents les mesures de sécurité à prendre avant de poser ce geste. N'oubliez pas qu'un enfant peut résister à être touché parce qu'il souffre d'un problème d'intégration sensorielle ou de chocs post-traumatiques suite à des abus physiques et sexuels.

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Aux USA, il existe une autre forme de thérapie de maintien, le "processus Z" de Robert Zazlow (Zazlow et Menta, 1975) ou thérapie de réduction de la rage.
Cette méthode implique de maintenir physiquement l'enfant pour le confronter et travailler à travers la rage et la résistance motrice de façon à réinstaurer une relation positive avec le thérapeute. Généralement la thérapie est utilisée pour provoquer la rage. Zazlow croit que la rage dans le maintien est la dernière résistance du négativisme et aussi le commencement d'un comportement positif. Tout comme Welch, il croit que les raisons d'utiliser le maintien sont de rétablir la confiance en créant une situation de crise dans le but de régénérer le cycle de la confiance et par conséquent un lien.
Plus l'enfant est âgé plus ses mécanismes de défense sont sophistiqués. Quand un enfant est adolescent avec des années de souffrance et de rejet, les niveaux d'intrusion doivent augmenter pour faire face à ses défenses. Au niveau le plus intrusif de la thérapie du maintien, le thérapeute utilise des techniques destinées à assurer sa sécurité et celle de l'enfant. L'enfant est enveloppé dans une couverture et physiquement maintenu par plusieurs adultes. Ce processus en lui-même enlève tout contrôle à l'enfant, créant un sentiment d'impuissance.

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Les critiques de la thérapie du maintien/attachement la considèrent comme abusive.
Si elle est mal utilisée, elle pourrait traumatiser un enfant déjà traumatisé. En tout état de cause, cette forme de thérapie ne doit être utilisée que par une équipe de thérapeutes avertis et jamais improvisée par un parent qui voudrait se débrouiller tout seul.

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Françoise Hallet

Voir : précautions et limites du holding

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