questions / réponses

un soutien à l'adoption

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Les noms et détails présents dans les témoignages publiés ci-dessous ont été modifiés afin de préserver l'anonymat, quand celui-ci a été demandé.

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Phobie et agressivité à l'école maternelle

- septembre 2014 -

Bonjour,

Nous avons adopté mon mari et moi une petite fille qui a 4 ans maintenant. Nous sommes allés la chercher à Sofia en Bulgarie en décembre 2013.
Je suis restée avec ma fille pendant 4 mois et puis notre nièce l'a gardée à domicile. En parallèle avec notre nièce, nous avons mis notre fille à l'école en petite section. Tout s'est très bien passé. Depuis maintenant 15 jours, nous l'avons mise chez une nounou, qu'elle connaissait.
Jusqu'à là, très bien, sauf que depuis une semaine notre fille a repris l'école en moyenne section et a commencé à avoir la phobie que les autres enfants la touchent. Elle en serait agressive.
Je précise aussi une petite chose, notre fille est appareillée des 2 oreilles et suivie par une orthophoniste 2 fois par semaine. Notre fille comprend tout mais a encore de la difficulté à faire des phrases.

Nous lui avons parlé avec des mots adéquats à son âge, qu'elle ne devait pas faire du mal aux enfants, la nounou le lui a aussi expliqué, nous savons qu'elle comprend qu'elle fait bobo aux autres, mais on dirait que c'est plus fort qu'elle. Je précise que notre fille a entièrement confiance en nous.

Que pouvons-nous faire de plus ?

Merci beaucoup pour vos conseils.



Difficile de suggérer quelque chose sans connaître l'enfant et avec si peu d'éléments (même si votre exposé est précis et bien fait)...
Ce que je suppose, c'est qu'il s'est passé quelque chose à l'école qui a réveillé de l'angoisse chez elle, et qu'elle se défend contre sa peur en agressant les autres (la meilleure défense c'est l'attaque).
Elle pourrait se défendre par la fuite, en refusant d'aller à l'école, ou en se repliant sur elle-même, elle agresse, c'est plutôt signe de bonne santé psychique... Mais vous ne pouvez pas la laisser continuer, bien entendu.

Donc je chercherais une psy pour enfants, ou mieux peut-être si votre enfant a des problèmes de communication liés à son appareillage, une art-thérapeute qui travaille avec le dessin, qui aura besoin de parler à votre fille, mais aura moins besoin de la faire parler, ce sont alors les dessins qui parlent. Le problème évidemment c'est de trouver la bonne art-thérapeute, affaire de chance, de relations... Dans ma ville (Nantes) j'ai des noms à proposer, mais pas dans la France entière ! Les pédiatres en connaissent-ils ? D'autres parents, adoptifs ou non ?
De toute façon ça mérite d'être tenté, il y a d'excellents art-thérapeutes... et les psys pour enfants travaillent eux-mêmes souvent avec le dessin.

Bonne chance, et je serais heureuse d'être tenue informée si vous trouvez une bonne piste.

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Faut-il surveiller les étapes du deuil de la mère biologique ?

- octobre 2012 -

Bonjour,

j'ai assisté à une conférence sur l'adoption.
Selon l'intervenante, tout enfant adopté, pour être épanoui, doit faire le deuil de sa mère biologique en franchissant les "7 étapes du deuil".

J'ai deux garçons adoptés, qui connaissent leur histoire, mais je ne parle pas à longueur de journée de l'adoption ; je me demande si je dois en parler intensément pour qu'ils réalisent ces étapes ou, puisqu'ils vont bien, laisser faire la vie ?

Merci de votre réponse.



Bonjour,

On peut, je pense, présenter les choses un peu autrement : si vos enfants sont à l'aise dans leurs baskets, heureux de vivre et épanouis, c'est qu'ils ont déjà, et rapidement peut-être, fait le deuil de leur mère biologique. Mais il est possible aussi qu'ils soient en ce moment dans la petite enfance, sans souci du passé, et que des questions leur reviennent à l'adolescence... Aucune raison en tout cas de parler en permanence d'adoption à des enfants jeunes : c'est important qu'ils le sachent (pas de mensonge, pas de secret), important qu'ils sentent qu'ils peuvent poser des questions lorsqu'ils ont envie d'en poser (pas de tabou), mais important aussi qu'ils puissent vivre au présent sans être obsédés par le passé.

Je pense que ce qu'a dit la conférencière vaut pour les parents dont les enfants sont actuellement mal dans leur peau à l'arrivée dans leur famille, et parfois pendant 18 mois à 2 ans (j'en connais plusieurs cas) : cela peut alors aider les parents de comprendre que telle ou telle attitude de leur enfant n'est pas faite pour les embêter spécialement, ou pour les rejeter définitivement, mais est le signe que leur enfant traverse en ce moment telle ou telle période de ce deuil, qui peut être aussi le deuil d'une nounou, d'une maman de famille d'accueil, d'une auxiliaire de puériculture ou d'une infirmière à laquelle ils se sont attachés.
Certains enfants s'attachent rapidement à leurs parents adoptifs, et pour d'autres cela demande du temps parce qu'ils ont perdu quelqu'un à qui ils s'étaient attachés auparavant, surtout s'ils arrivent déjà un peu grands.

En résumé : laissez faire la vie, mais soyez attentive aux questions qu'ils pourraient souhaiter vous poser, sans les provoquer. Parfois c'est bien de vivre avec son enfant une activité silencieuse, promenade ou recette de gâteau ou jardinage ou peinture …pour permettre à l'enfant d'aborder une question qu'il hésite à poser... et s'il n'y a pas de question, c'est un bon moment à vivre ensemble de toute façon.
N'hésitez pas, vous, à raconter des souvenirs de votre enfance, ça peut les aider à parler d'eux-mêmes.

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Conflit au sein de la fratrie

- septembre 2010 -

Bonjour,

Voilà, nous sommes parents de 4 enfants, nos deux ainées biologiques et nos deux derniers adoptés (fratrie adoptée depuis 4 ans et demi).

Globalement, la fratrie de 4 nous semble constituée, à ceci près que des conflits récurrents existent entre notre fille de 13 ans aujourd'hui (biologique) et son frère de 9 (adopté). Des conflits existent aussi de façon plus communes entre tous comme dans toutes les fratries.

Cependant, ce soir, un conflit entre les 3 plus jeunes a éclaté et pris des proportions émotionnelles importantes pour chacun.

La grande était en larmes, inconsololable, exprimant : "Je ne les supporte plus, j'en peux plus, ils m'énervent, ils sont toujours contre moi, ..." et les deux garçons très en colère : "Elle est trop chiante" et je vous passe toutes les insultes contre elle, puis quand j'ai tenté une intervention pour tendre vers le dialogue, j'ai entendu qu'ils voulaient se tuer, qu'ils étaient noirs et qu'on aimait que les blancs, ... Difficile soirée, mais nous avons mangé autour de la même table sans trop de communication entre eux, et chacun semble s'être endormi.

Ce soir, j'ai des questions plein la tête : devons-nous proposer à nos enfants un soutien spychologique, est-ce une démarche plus familiale, plus individuelle auprès de notre fille et/ou de notre fils, ou bien attendre que ça évolue ? Est-ce que d'autres expériences similaires ont été vécues ?

Merci par avance pour vos conseils, retours, réconfort !



Bonjour,

C'est toujours très douloureux pour des parents qui aiment leurs enfants de percevoir entre eux des moments de violence voire de haine...
Et cependant c'est extrêmement fréquent !
Aimer et détester, ce sont l'avers et le revers de la même médaille.
On déteste celui qui déçoit notre amour, qui ne répond pas à notre amour, il y a en général de l'amour déçu dans la haine...

Et entre les enfants d'une même famille, j'entends d'une famille "ordinaire", pas adoptive, c'est très fréquent. On vit si proche qu'on se heurte inévitablement à l'autre et à ses différences.
Et cela ne préjuge en rien des excellentes relations qu'ils auront peut-être (peut-être !) entre eux lorsqu'ils seront adultes.

J'ai observé aussi que dans les situations d'adoption après "conception" de plusieurs enfants, c'est souvent le dernier enfant de la fratrie biologique qui encaisse le choc de l'enfant ou des enfants adoptés : il est le plus proche en âge donc le plus exposé à la rivalité et aux conflits quotidiens, et il perd la place assez privilégiée de petit dernier choyé par les grands.
L'aîné au contraire y gagne souvent prestige au dehors et autorité au dedans, il se rapproche des parents.

Alors, tout est normal ? Peut-être oui, mais je ne peux pas en être sûre, et exclure que vous ayez des raisons de vous inquiéter.
A votre place, je laisserais passer un peu de temps (un mois ?), tout en étant attentifs aux relations des enfants entre eux et à l'ambiance des repas de famille.
Si tout redevient normal, sans tension particulière, ce n'était qu'une crise de fratrie parmi d'autres, inutile d'y revenir et de dramatiser.

S'il vous reste le sentiment d'un malaise, je profiterais d'un tête-à-tête avec chaque enfant pour lui demander :
"Tu te rappelles le jour où... etc ? Est-ce que tu gardes de la rancoeur ? Est-ce que c'est difficile pour toi de vivre dans notre famille, avec tes frères et soeurs ? Veux-tu qu'on en parle ensemble ? Ou aimerais-tu en parler avec quelqu'un d'extérieur à la famille, tu te sentirais plus libre peut-être..."

Bref, j'aiderais l'enfant à mettre des mots sur ce qu'il vit et j'ouvrirais la porte à un soutien psychologique...
Mais pas maintenant, pas à chaud, pour ne pas risquer de dramatiser sans raison une querelle d'enfants.

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Agressivité à l'école d'un enfant scolarisé peu après son adoption

- septembre 2010 -

Bonjour,

Nous avons adopté notre fils en août 2010 en Ukraine et il est rentré en maternelle cette année (il a eu 3 ans). Nous pensions qu'il apprendrait mieux le français avec d'autres enfants.

Le deuxième jour de rentrée j'ai su qu'il avait mordu un garçon et aujourd'hui la maîtresse m'a dit qu'il a griffé un autre enfant. Elle m'a demandé de lui dire de ne pas le faire.

Avec des gestes nous lui avions déjà montré qu'il ne faut pas mordre, maintenant nous allons montrer de ne pas griffer.

Que pouvons-nous faire d'autre?

Merci



Bonjour, et merci de nous soumettre votre question.

L'agressivité est (hélas!) quelque chose de très naturel chez les enfants, le tout-petit est très agressif et c'est la "contenance" bienveillante de ses parents et particulièrement de sa mère (ou de sa nounou ou de sa mère adoptive etc.) qui apprend à l'enfant à la réfréner, mais la jalousie par exemple la réveille très souvent, y compris chez des enfants qui ne sont pas adoptés.
Mais si votre petit a manqué d'un entourage bienveillant, protecteur, disponible, pendant ses premiers mois voire ses premières années, il ne sait pas encore réfréner son agressivité, il griffe et mord comme s'il y allait de sa survie.
Il gère mal ses émotions et cela peut durer. Il ne se sent pas en sécurité à l'école et cela éveille immanquablement angoisse et agressivité.

Ce que vous pouvez faire ? S'il en est encore temps (si vous n'avez pas repris le travail tous les deux), le retirer rapidement de l'école et attendre janvier pour réessayer de le scolariser, prudemment et en douceur (ce sera plus difficile que si vous ne l'aviez pas déjà mis à l'école en septembre, je le crains !).
Car cet enfant arrivé en août n'a pas eu le temps de nouer avec vous une relation suffisamment sécure pour supporter la séparation : l'école vécue comme un lieu où vous l'abandonnez réveille son angoisse, donc son agressivité. L'argument "lui apprendre à parler" est bien faible je trouve (excusez ma franchise, je parle sans détour) : les enfants de trois ans parlent mal encore, c'est avec vous qu'il apprendra le mieux à parler si vous lui parlez beaucoup (n'ayez pas peur de le faire, il vous comprendra très vite, plus vite qu'il ne pourra parler lui-même, mais le tout va toujours très vite), et de toute façon vous n'êtes pas à trois mois près pour sa scolarité ! Aurait-il 5 ans que je vous donnerais le même conseil... D'abord mettre l'enfant en sécurité intérieure, avant de lui faire revivre une séparation.

Si vous avez repris le travail... Une baby-sitter à domicile, en la choisissant bien ?
Mais vous avez un congé parental à prendre, non ? Il n'est pas déjà terminé ?

Bonne chance, n'hésitez pas à réagir à ce message, à me tenir informée...

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Agressivité verbale et problèmes de sommeil

- août 2010 -

Nous avons 3 enfants dont C., 3 ans et demi, adopté en Ethiopie et avec nous depuis 17 mois.

Nous avons accueilli C. à l'aéroport en février 2009. Il s'est tout de suite blotti dans mes bras. Il s'est rapidement attaché à nous (papa, maman et soeur aînée) ainsi que par la suite à la famille élargie.

Au départ il faisait énormément de colères et ne supportait pas du tout d'être contrarié. Au fur et à mesure qu'il a commencé à maîtriser notre langue, les colères se sont espacées. Cependant il reste un petit garçon au caractère bien trempé et qui veut constamment attirer l'attention sur lui, que ce soit en faisant des bêtises, en s'en prenant à sa petite sœur, ou en sollicitant des énormes câlins.

Grosso modo nous trouvons que les choses ne se passent pas trop mal depuis son arrivée : il l'air de s'être bien intégré dans sa nouvelle vie, il fait énormément de progrès en tout genre depuis son arrivée et à l'école cela se passe relativement bien également.

Deux comportements cependant nous posent un problème :

Premièrement, C. est souvent très agressif vis-à-vis de moi.
Pas physiquement mais verbalement. Il me parle comme si s'était lui le chef. Il me donne des ordres et exige de moi toute mon attention.
C'est typiquement avec moi qu'il se comporte comme cela. Avec mon mari il n'ose pas avoir ce comportement. Bien entendu je ne l'accepte pas je le reprends, voire le punis quand il exagère.
Mon mari me dit que je ne suis pas assez ferme avec lui. Mais je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus. Quand il me parle mal je le gronde ou je l'ignore en lui disant que je n'entends pas quand on me parle comme cela. Tout de suite il se reprend mais recommence très vite. Je lui tiens tête également et quand je dis quelque chose je m'y tiens...

La deuxième chose qui m'inquiète, c'est son sommeil.
Chaque mise au lit est une épreuve, il hurle, s'accroche à moi, sort de son lit avant que j'aie quitté la chambre.
Nous avons tout essayé : que se soit mon mari qui le monte au lit ; rester près de lui pour l'endormir (mais alors il lutte contre le sommeil) ; instaurer un rituel avec histoire et une chanson, mais quand cela a commencé à marcher il n'a plus voulu de l'histoire, comme si en se laissant aller il allait perdre la maîtrise des choses.
Nous avons également essayé de remonter près de lui pour le rassurer en laissant toujours un peu plus de temps mais en fait à chaque fois qu'on va dans sa chambre on a l'impression de relancer la machine.

Les choses se sont évidement améliorées depuis son arrivée. Les hurlements ne durent plus des heures, mais 10 à 15 minutes, ensuite il papote.
Mais nous ne parvenons à ce qu'il aille se coucher sereinement. Quand il commence à pleurer il n'écoute plus rien, il n'y a pas moyen de le raisonner et de discuter avec lui.
De même, si par malheur pendant la nuit il s'éveille c'est de nouveau des hurlements et des colères.

Nous sommes évidemment extrêmement fatigués, mais surtout nous nous inquiétons de voir qu'après 17 mois avec nous les choses n'évoluent plus beaucoup.

Nous avons peur de mal faire et de passer à côté de quelque chose.

Avons-nous la bonne attitude ? Est-ce normal qu'après autant de temps le coucher soit toujours aussi difficile ?

Je vous remercie de l'attention que vous porterez à ce message.

Cordialement



Si je résume bien, vous vivez une adoption réussie, mais avec deux comportements qui vous inquiètent, et qui de fait doivent avoir du sens pour cet enfant arrivé à 2 ans d'Ethiopie, un âge où on ne peut pas expliquer grand chose à un enfant, il vit un arrachement, se cramponne là où il arrive, mais reste dans la peur d'être abandonné ...
Imaginez une seconde qu'il se soit attaché avant vous à une femme (sa maman, une nounou, etc.) et qu'un jour il ne l'ait plus retrouvée à son réveil : cela peut suffire à expliquer qu'il préfère contrôler les femmes (il faut s'en méfier si on veut les garder, on les aime mais on ne peut pas leur faire confiance... ) et qu'il ait une trouille bleue d'aller dormir : va-t-il encore retrouver ceux qu'il aime à son réveil ?

Donc que faire ? D'une part, trouver des réponses adaptées aux attitudes de C. et qui puissent vous soulager au quotidien, et en même temps, s'attaquer aux causes profondes de ces symptômes.

L'agressivité à votre égard :
Fermeté d'un côté, comme le dit votre mari, exiger les merci, les s'il vous plaît et la gentillesse de ton pour demander, mais en même temps redire à C. : "C., tu peux faire confiance à maman, elle ne s'en ira pas... Les petits enfants ne commandent pas dans une maison, c'est le papa et la maman qui commandent, qui savent ce qui n'est pas dangereux pour un enfant, tu dois me faire confiance, je m'occupe de toi, je sais ce qu'il te faut, je ne te laisserai jamais etc ..."
Autrement dit être sécurisante (et pas angoissée !) car cet enfant a encore besoin d'être rassuré, de toute évidence... Ça ne sera pas magique, mais il faut conjuguer fermeté éducative et sécurité affective pour l'enfant. Quand la petite soeur pleure, vous "obéissez"... C. essaie de vous faire marcher de la même manière, il a la maturité affective d'un gosse de 18 mois pas plus...
Restez sereine, ne vous angoissez pas... Il a besoin de vous sentir solide.

Le sommeil :
Ça doit être épuisant pour vous ! Il y a deux suggestions, empruntées l'une à une maman d'ici, l'autre à Johanne Lemieux je crois, que j'ai indiquées récemment sur le site :
L'une c'est de lui donner pour dormir votre oreiller à vous, un oreiller avec votre odeur (pas avec une taie propre etc) et lui dire que vous y tenez beaucoup, qu'il est magique pour faire dormir, que vous le reprendrez dans votre chambre le lendemain matin... En sorte qu'il se sente accompagné par vous en entrant dans le sommeil .
L'autre : deux "autorisations" de faire venir quelqu'un s'il est trop inquiet : Vous lui donnez deux "cartons" - des cartes de visite ou autres, jolies si possible, qui sont des autorisations de vous déranger la nuit parce qu'il a peur, en précisant que ça fait deux et pas plus. Au-delà vous serez très fâchés et vous refuserez de venir. Mais deux, c'est possible...
Variante possible : deux autorisations de venir dormir sur un petit matelas installé dans votre chambre. Deux autorisations valables une semaine ? deux ? à vous d'ajuster ...
L'idée est que, lorsque l'enfant a joué sa première carte (ce qu'il fait bien sûr) et que vous l'avez à nouveau consolé, accompagné ou accueilli etc en lui retirant un carton, vous le recouchez en lui disant : "attention, tu n'en as plus qu'un, si tu l'utilises ensuite tu n'en n'as plus". L'expérience semble montrer que l'enfant s'endort avec son deuxième carton sans réveiller les parents : le carton est une assurance symbolique de leur présence, et il préfère éviter de se retrouver sans rien, le carton restant l'aide à apprivoiser son angoisse...
N'oubliez pas de mettre des mots sur ce que vit l'enfant :  "je sais pourquoi tu as du mal à dormir tout seul, tu as peur qu'on s'en aille pendant que tu dors et de te réveiller tout seul, mais tu sais bien que nous on ne fera pas ça, je sais que c'est dur pour toi de faire confiance, etc." mettre des mots dans la journée, dans un moment serein, pour que les émotions prennent aussi du sens pour l'enfant ...
Même chose pour son agressivité à votre égard, lui donner du sens, mettre ce sens en mots, ("tu en veux aux mamans, aux dames qui laissent les enfants tout seuls ? Est-ce que c'est pour ça que tu me parles sur ce ton ?") peut aider l'enfant à prendre de la distance intérieure par rapport à ses émotions au lieu d'en être submergé.
Enfin s'attaquer aux causes... Vu son âge, essayer peut-être une thérapie brève de type EMDR car derrière ce comportement, cette peur de la séparation nocturne, il y a le traumatisme d'autres séparations antérieures sur lequel il faut essayer de travailler. Je ne crois pas fanatiquement aux thérapies brèves, mais avant d'entamer un cursus thérapeutique de longue haleine, il est sage et économique de voir si des thérapies qui n'engagent pas dans une longue durée peuvent être efficaces, et l'EMDR semble l'être parfois (assez souvent ?) En ce cas renseignez-vous bien sur le praticien retenu (formation sérieuse et complète, formation spécifique pour appliquer l'EMDR avec un enfant etc) Les fédérations publient sur internet la liste des praticiens qu'elles reconnaissent (car il peut se trouver des thérapeutes  un peu improvisés, avec une formation insuffisante et qui se lancent pour faire du fric ... )

Mais je me permets de répéter en conclusion : Restez sereine, ne vous angoissez pas... Il a besoin de vous sentir solide.
Plus un enfant a un comportement perturbé, plus il a besoin de sécurisation, et sa sécurité c'est la confiance sereine de l'adulte qui s'occupe de lui... Sa confiance dans l'enfant, dans l'avenir...

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Attachement difficile du parent

- avril 2010 -

Nous sommes parents de 2 garçons biologiques et avons adopté une petite fille en Haïti il y a 2 ans.
A l'attribution, on nous a dit qu'elle avait 4 ans. Nous avons accepté, malgré notre demande d'un enfant de "pas plus de 3 ans".
A l'arrivée de Nadia, nous nous sommes vite rendus compte qu'elle était en fait plus âgée : scan, dentition... En fait, elle avait déjà 5 ans et demi. Pour moi personnellement c'est très difficile. Je ne m'attache pas bien. Mon mari dit qu'on ne peut pas forcer, que ça viendra.
Mais elle a beau faire: je suis mal à l'aise avec elle, je ne sais pas lui faire de câlins. Quand elle m'en demande je la laisse faire mais je ne participe pas.
Pourtant, je sais qu'elle aimerait que je la prenne...elle est très serviable et essaie de proposer son aide quand elle peut.

Je me sens mal de me sentir comme cela, mais je n'arrive pas à changer. Je voulais un enfant plus jeune, plus dépendant...
Pouvez-vous m'aider?



Bonjour, et merci d'avoir eu le courage et l'honnêteté de nous livrer ce témoignage.

1. Je comprends que Nadia n'est pas la petite fille dont vous aviez rêvé et que vous vous sentez coupable de mal l'aimer, de peu l'aimer, de manquer d'élans affectifs à son égard... Et, j'imagine, de préférer vos garçons !
D'un côté je comprends ce sentiment de culpabilité : vous êtes allés la chercher, elle ne vous avait rien demandé, et maintenant vous ne vous sentez pas "à la hauteur"...
On peut dire que vous avez raison de culpabiliser, mais ça ne vous aide pas du tout, au contraire : plus vous vous culpabilisez à cause d'elle et moins vous pouvez l'aimer puisqu'elle vous met mal à l'aise, vous renvoie de vous une image qui ne vous plaît pas...

2. Alors je vous  propose autre chose : elle est arrivée grande déjà, vous ne l'avez pas portée ni choyée comme vous l'avez fait pour vos garçons, et donc de toute façon vous ne l'aimez pas autant, pas de la même manière, mais est-ce cela l'important ?
Les parents d'autrefois qui avaient des familles de 6, 7 voire 11 enfants ou plus ne devaient pas beaucoup se questionner pour savoir s'ils les aimaient tous pareil, autant etc. Ils essayaient de satisfaire à leurs besoins, de leur donner de la sécurité, et c'est cette base-là l'essentiel pour un enfant : se sentir en sécurité chez vous, définitivement, c'est plus important pour Nadia actuellement que de percevoir chez vous un élan affectif.

3. C'est peut-être d'ailleurs votre réserve qui l'aide, elle, à s'attacher, car vous ne faites pas pression sur elle, vous n'attendez pas d'elle des élans affectifs, elle peut y venir à son rythme, alors que souvent des adoptions sont  difficiles pour des raisons contraires : le parent fait trop pression auprès de l'enfant pour qu'il réponde à son amour, et l'enfant n'y arrive pas, se  sent décevant, culpabilise comme vous le faites en ce moment, et ça n'arrange rien pour lui !!!

4. Représentez vous la situation comme ça : un frère à  vous, ou une amie très chère, s'est marié en Afrique, a eu une petite fille, et le couple est décédé, et vous avez alors décidé de recueillir cette enfant.
Par moment ça vous pèse un peu, c'était une décision lourde, mais c'est fait, vous êtes quelqu'un de bien de l'avoir fait, et personne ne peut s'attendre à ce qu'elle tienne dans votre vie la même place que vos garçons.
Soyez avec elle attentive, tolérante (elle a souffert), chaleureuse si vous le  pouvez, sans vous demander l'impossible et sans vous faire de reproches...  
Soyez cool avec vous-même, indulgente... Proposez-vous chaque jour un geste gentil à son égard, un seul, et félicitez-vous de l'avoir fait.
Si vous le pouvez, trouvez-lui de gentils parrain et marraine chez qui elle puisse aller de temps en temps en week-end ou en vacances et que ce soit pour elle comme  une fête et pour vous comme un moment pour souffler, et laissez faire le temps  comme le dit votre mari. Si vous n'attendez pas trop de vous-même, vous vous  surprendrez probablement à vous apercevoir qu'elle vous touche, qu'elle a pris de la place dans votre vie...
Ne regardez pas en arrière (n'ayez pas la nostalgie de la relation que vous aviez imaginée), regardez devant... Elle a déjà 7 ans et dans une dizaine d'années elle sera adulte, vous aurez aidé une enfant à devenir une belle adulte ! C'est le vrai rôle des parents, la spontanéité de l'amour c'est la cerise sur le gâteau...
Ça viendra peut-être ! Je vous le souhaite en tout cas.

5. Comment ça se passe entre Nadia et ses frères ? Sont-ils affectueux avec elle ? Et votre mari ? Nadia a trouvé une famille, et pas seulement une mère. Comment ça se vit, dans la famille ?

Bonne suite, je reste à l'écoute si vous voulez continuer à nous parler.


Nota : Suite à cet échange, nous avons enrichi ce site d'une partie intitulée "du côté des parents", qui reprend en partie la réponse ci-dessus.

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